Henri-Claude Oyima et l’audit des comptes publics : une décision controversée

La gestion des comptes publics au Gabon suscite aujourd’hui une vive polémique, après la décision du ministre de l’Économie et des Finances, Henri-Claude Oyima, de confier leur audit à un cabinet de conseil privé. Une démarche inattendue qui relègue au second plan l’Inspection Générale des Services (IGS), pourtant l’organe habilité à effectuer ce type de mission dans le strict respect des règles administratives.
Un cabinet au profil discutable
Le cabinet IX ADVISORS, choisi pour cette mission sensible, fait l’objet de critiques acerbes. Selon une enquête menée par le journal Échos du Nord, cette structure présente des références bien maigres pour une tâche d’une telle ampleur. Loin de rassurer, ce choix soulève des interrogations sur les critères ayant conduit à sa sélection.
Mais le problème ne s’arrête pas là. Toujours selon la même enquête, Patrick Obiang Obame, présenté comme un membre clé de ce cabinet, est également le Directeur de l’audit interne de BGFIBANK. Une révélation qui jette un sérieux doute sur la neutralité institutionnelle du processus. En effet, comment prétendre à une objectivité rigoureuse lorsque l’auditeur désigné est directement lié à une banque dont Henri-Claude Oyima demeure le patron, en plus de ses fonctions ministérielles ?
Un conflit d’intérêts flagrant
Ce cumul de responsabilités entre le ministère des Finances et BGFIBANK, et maintenant l’intrusion d’un cabinet au personnel étroitement associé à cette même banque, laisse penser à une stratégie d’influence au détriment de l’intérêt général. Cette situation s’apparente à une mise en scène où l’arbitre et le joueur partagent les mêmes intérêts.
Pourtant, l’administration publique gabonaise dispose d’une inspection générale des services, dotée des compétences requises pour auditer les comptes publics dans un cadre transparent et impartial. Pourquoi alors contourner cet organe, au profit d’un acteur privé dont la neutralité est plus que discutable ?
Un précédent dangereux pour la gestion publique
Cette décision de Henri-Claude Oyima ne se justifie pas et ouvre la voie à un dangereux précédent. Si l’administration publique elle-même est court-circuitée, quelle garantie reste-t-il que les résultats de cet audit refléteront une image fidèle et honnête de la gestion des finances publiques ?
De nombreux observateurs dénoncent une atteinte grave à la crédibilité des institutions et à la rigueur de l’administration publique. En confiant cette mission à un cabinet privé faiblement référencé et marqué par des conflits d’intérêts, Henri-Claude Oyima donne l’impression de privilégier des intérêts particuliers au détriment de l’État et des Gabonais.
L’urgence d’un sursaut institutionnel
Cette affaire illustre une fois de plus l’importance d’un sursaut institutionnel pour protéger les mécanismes de contrôle public de toute forme d’ingérence privée. La neutralité et l’impartialité doivent être les piliers de tout processus d’audit des comptes publics, surtout dans un contexte où les attentes citoyennes en matière de transparence et de responsabilité n’ont jamais été aussi élevées.
Henri-Claude Oyima devra s’expliquer. Les Gabonais ont le droit de savoir pourquoi un organe d’État compétent a été mis de côté, et pourquoi le choix d’un cabinet privé aussi controversé a été privilégié. Cette affaire, si elle reste sans réponse, risque de ternir davantage la confiance déjà fragile entre les populations et leurs institutions.